سجل مرشح الإساءة

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06:50، 13 أغسطس 2014: سهام بدوي (نقاش | مساهمات) أطلق المرشح 18; مؤديا الفعل "edit" في مقالة عن رواية هلاوس. الأفعال المتخذة: وسم; وصف المرشح: إضافة النصوص المشكوك في أنها منسوخة من مواقع أخرى (افحص)

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Hallucinations

(3)

C’est ce qui est arrivé cette nuit-là. J’étais à la maison, avec lui et mon frère aîné ; ma mère et mon petit frère dormaient. L’aîné somnolait sur le canapé. On était en pleines festivités pour le je-ne-sais combientième anniversaire de la révolution de l’armée.

On dira que c’était encore d’autres festivités pour l’anniversaire.

Quand il est apparu, le leader avait les traits tirés. Il s’est approché de l’écran, les yeux rivés sur la feuille devant lui, contrairement à ce que font d’habitude les leaders. Il avait la voix ébranlée, terne, le regard réfugié dans l’écrit, le maktoub, fuyant ceux, spectateurs et auditeurs, qui s’accrochaient à lui. Je n’étais pas du tout en train de suivre l’événement. J’étais en train de me demander comment je réussirais à convaincre Wissal de sortir avec moi, et la télé était un élément qui m’aidait à me dissimuler. Devant la télé, chaque individu est présent avec son corps, l’âme absente. Bien sûr, je ne lui prêtais guère attention. Son fauteuil faisait du bruit, comme n’importe quel bois vieux et décati. Maudite mémoire. Je ne me souviens plus comment est arrivé ce qui est arrivé. Les détails ne me viennent pas, me fuient, m’opposent leur rage et leur obstination. Peut-être se lovait-il un peu plus profond dans le fauteuil, peut-être son visage se crispait-il, en sueur. Peut-être retenait-il son souffle un peu plus fort. Peut-être empêchait-il l’oxygène d’arriver. Son visage s’assombrit, prit une teinte presque violette. Directement, il me précipita dans l’instant. Le sang de l’instant. J’étais pris de court.

Etait-ce le visage du leader ? Ou cette feuille tremblotante ?

Je le vis avancer vers la télé ; le leader maintenant épongeait la sueur de son front, au moment même de l’attaque. Deux mains imposantes ont attrapé l’appareil — avec à l’intérieur le leader — et l’ont jeté à terre. Cela a fait comme l’explosion d’une bombe : une lumière très forte et puis l’obscurité totale. Une étoile qui a brillé puis s’est abattue, une étoile qui de blanche est devenue noire, qui lumineuse s’est obscurcie. Le pauvre appareil était réduit en bris. Lui riait, insultait, maudissait. Le pyjama vert, les mains imposantes, le leader brûlé, l’appareil détruit, la peur infinie. Qu’était tout ce désordre ? De délicates créatures t’empêchent d’avancer. Hurlements de ma mère. Fumée étouffante. Hurlements de ma mère. Coups sur la porte. Hurlements de ma mère. Puis un rire hystérique de sa part à lui. Le bordel. Le bordel. Hurlements. Le bordel. Un regard qui zyeute le monde en biais ; ses yeux dilatés au maximum. Hurlements. Effarant regard en biais. Pupilles écarquillées à l’extrême.

Installé sur ses débris, il rit. Les coups sur la porte, toujours. Aucun d’entre nous n’est capable d’approcher pour ouvrir. De l’extérieur, j’entends une voix s’inquiéter de mon père, de nous aussi. Est-ce que les gens ont eu peur du bruit de l’explosion ou de la fumée noire s’échappant des fenêtres de la maison ? Je hurlais de toutes mes forces à celui qui martelait la porte d’entrée :

— Ce n’est rien, juste un peu de désordre. N’ayez pas peur. Juste un peu de désordre. Désordre, désordre, désordre.

Un désordre insupportable pour le cœur. Plus que le cœur ne peut supporter, je vous le jure. Qui est cet homme ?

C’est mon père. Toute cette énergie destructrice, c’est lui.

Il s’est mis à marcher sur les entrailles et les débris de la télé. La scène se macula de rouge. Son sang. Ce que je voyais là était son sang. Lui, il hurlait : « Tu es un menteur, menteur, menteur, vous êtes tous des menteurs, des fils de chien, je vais tous vous juger, espèces de … ».

Mon frère l’a attaché. Il est resté comme ça, attaché, pendant trois jours. C’était jusqu’à présent la période d’enfermement la plus longue qu’il avait passée à la maison.

Avant, on l’attachait une heure, ou parfois plusieurs, ou pendant la nuit. Cette fois-ci il était resté attaché pendant plus de cinquante heures. Il délirait. Il ne mangeait pas, et n’a presque pas dormi pendant toutes ces heures. Cela a été pour lui la plus longue période sans sommeil : trois jours et trois nuits. Après ça, mon père a caché toutes les cordes qu’il y avait à la maison. Il a sectionné les cordes à linge, caché les clés de toutes les chambres. On ne les a jamais retrouvées. Je rigolais, la nuit, quand je me rappelais lui, qui nous hurlait au visage : tas d’abrutis, je vous protège et ça ne vous plaît pas !

Je me rappelais l’enfant qui tapait à la porte — le fils des voisins — et me remis à rire. Pendant que je lui parlais, j’avais le regard fixé sur ses mains et il les avait cachées derrière son dos :

— Qu’est-ce que tu veux mon chéri ?

— Je veux regarder.

— Tu as raison, mon fils. C’est effectivement un spectacle.

(4)

Je ne sais pas comment c’est arrivé. On s’est rendu compte qu’il avait disparu. Des heures, qui se transformèrent en jours, puis en semaines.

Sahaba avait disparu.

Pas trace de lui sur les listes des urgences dans les hôpitaux ou les postes de police, ni chez les proches, les connaissances, les amis, ni même au village, à Mansoura, où se trouvaient la maison de son père et sa terre qui …

Je ne sais rien de tout cela si ce n’est le résultat. Le retour de Sahaba. La lune avait cessé d’être pleine. Et l’hiver était au plus profond.

Au moment où on s’est fatigués de chercher, Sahaba est revenu. A l’aube d’une nuit d’hiver au froid mordant. En sous-vêtements. Il grelottait.

Déjà, de plus en plus, il nous échappait, perdu loin de nous. Il jouait sur un nay (une flûte), que personne d’entre nous n’avait vu auparavant. Un jeu habile. Il jouait, sans répondre à aucune question, sans prononcer un seul mot. Jusqu’à l’aube. Puis il s’endormit.

Le matin, ma mère rigolait car il lui avait raconté qu’il avait épousé une femme qui valait beaucoup plus qu’elle. Moi aussi je riais de ces papillons qu’il gardait dans sa poche dans une boîte en plastique. D’où les avait-il ramenés ? Comment les avait-il chassés ? Comment les avait-il conservés dans cet état malgré la sécheresse de la mort ?

D’autres questions surgissaient, en plus du nay, des semaines pendant lesquelles il avait disparu, de la barbe qui pour la première fois avait poussé comme si elle datait de plusieurs années et pas de quelques semaines.

Sahaba, ou le cheikh Sahaba, comme on l’appelait désormais dans la rue, depuis cette barbe qu’il refusa de raser. Chasseur de papillons et joueur du nay. De quelle forêt et de quel paradis m’a-t-on offert tout cela ?

Des questions … qui en amenaient d’autres.
Sahaba le mystère. Sahaba l’indécision. Sahaba mon premier maître. La première leçon. Sahaba est le premier à m’avoir appris que si les réponses, parfois, meurent, les questions, elles, ne meurent jamais .

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'Hallucinations (3) C’est ce qui est arrivé cette nuit-là. J’étais à la maison, avec lui et mon frère aîné ; ma mère et mon petit frère dormaient. L’aîné somnolait sur le canapé. On était en pleines festivités pour le je-ne-sais combientième anniversaire de la révolution de l’armée. On dira que c’était encore d’autres festivités pour l’anniversaire. Quand il est apparu, le leader avait les traits tirés. Il s’est approché de l’écran, les yeux rivés sur la feuille devant lui, contrairement à ce que font d’habitude les leaders. Il avait la voix ébranlée, terne, le regard réfugié dans l’écrit, le maktoub, fuyant ceux, spectateurs et auditeurs, qui s’accrochaient à lui. Je n’étais pas du tout en train de suivre l’événement. J’étais en train de me demander comment je réussirais à convaincre Wissal de sortir avec moi, et la télé était un élément qui m’aidait à me dissimuler. Devant la télé, chaque individu est présent avec son corps, l’âme absente. Bien sûr, je ne lui prêtais guère attention. Son fauteuil faisait du bruit, comme n’importe quel bois vieux et décati. Maudite mémoire. Je ne me souviens plus comment est arrivé ce qui est arrivé. Les détails ne me viennent pas, me fuient, m’opposent leur rage et leur obstination. Peut-être se lovait-il un peu plus profond dans le fauteuil, peut-être son visage se crispait-il, en sueur. Peut-être retenait-il son souffle un peu plus fort. Peut-être empêchait-il l’oxygène d’arriver. Son visage s’assombrit, prit une teinte presque violette. Directement, il me précipita dans l’instant. Le sang de l’instant. J’étais pris de court. Etait-ce le visage du leader ? Ou cette feuille tremblotante ? Je le vis avancer vers la télé ; le leader maintenant épongeait la sueur de son front, au moment même de l’attaque. Deux mains imposantes ont attrapé l’appareil — avec à l’intérieur le leader — et l’ont jeté à terre. Cela a fait comme l’explosion d’une bombe : une lumière très forte et puis l’obscurité totale. Une étoile qui a brillé puis s’est abattue, une étoile qui de blanche est devenue noire, qui lumineuse s’est obscurcie. Le pauvre appareil était réduit en bris. Lui riait, insultait, maudissait. Le pyjama vert, les mains imposantes, le leader brûlé, l’appareil détruit, la peur infinie. Qu’était tout ce désordre ? De délicates créatures t’empêchent d’avancer. Hurlements de ma mère. Fumée étouffante. Hurlements de ma mère. Coups sur la porte. Hurlements de ma mère. Puis un rire hystérique de sa part à lui. Le bordel. Le bordel. Hurlements. Le bordel. Un regard qui zyeute le monde en biais ; ses yeux dilatés au maximum. Hurlements. Effarant regard en biais. Pupilles écarquillées à l’extrême. Installé sur ses débris, il rit. Les coups sur la porte, toujours. Aucun d’entre nous n’est capable d’approcher pour ouvrir. De l’extérieur, j’entends une voix s’inquiéter de mon père, de nous aussi. Est-ce que les gens ont eu peur du bruit de l’explosion ou de la fumée noire s’échappant des fenêtres de la maison ? Je hurlais de toutes mes forces à celui qui martelait la porte d’entrée : — Ce n’est rien, juste un peu de désordre. N’ayez pas peur. Juste un peu de désordre. Désordre, désordre, désordre. Un désordre insupportable pour le cœur. Plus que le cœur ne peut supporter, je vous le jure. Qui est cet homme ? C’est mon père. Toute cette énergie destructrice, c’est lui. Il s’est mis à marcher sur les entrailles et les débris de la télé. La scène se macula de rouge. Son sang. Ce que je voyais là était son sang. Lui, il hurlait : « Tu es un menteur, menteur, menteur, vous êtes tous des menteurs, des fils de chien, je vais tous vous juger, espèces de … ». Mon frère l’a attaché. Il est resté comme ça, attaché, pendant trois jours. C’était jusqu’à présent la période d’enfermement la plus longue qu’il avait passée à la maison. Avant, on l’attachait une heure, ou parfois plusieurs, ou pendant la nuit. Cette fois-ci il était resté attaché pendant plus de cinquante heures. Il délirait. Il ne mangeait pas, et n’a presque pas dormi pendant toutes ces heures. Cela a été pour lui la plus longue période sans sommeil : trois jours et trois nuits. Après ça, mon père a caché toutes les cordes qu’il y avait à la maison. Il a sectionné les cordes à linge, caché les clés de toutes les chambres. On ne les a jamais retrouvées. Je rigolais, la nuit, quand je me rappelais lui, qui nous hurlait au visage : tas d’abrutis, je vous protège et ça ne vous plaît pas ! Je me rappelais l’enfant qui tapait à la porte — le fils des voisins — et me remis à rire. Pendant que je lui parlais, j’avais le regard fixé sur ses mains et il les avait cachées derrière son dos : — Qu’est-ce que tu veux mon chéri ? — Je veux regarder. — Tu as raison, mon fils. C’est effectivement un spectacle. (4) Je ne sais pas comment c’est arrivé. On s’est rendu compte qu’il avait disparu. Des heures, qui se transformèrent en jours, puis en semaines. Sahaba avait disparu. Pas trace de lui sur les listes des urgences dans les hôpitaux ou les postes de police, ni chez les proches, les connaissances, les amis, ni même au village, à Mansoura, où se trouvaient la maison de son père et sa terre qui … Je ne sais rien de tout cela si ce n’est le résultat. Le retour de Sahaba. La lune avait cessé d’être pleine. Et l’hiver était au plus profond. Au moment où on s’est fatigués de chercher, Sahaba est revenu. A l’aube d’une nuit d’hiver au froid mordant. En sous-vêtements. Il grelottait. Déjà, de plus en plus, il nous échappait, perdu loin de nous. Il jouait sur un nay (une flûte), que personne d’entre nous n’avait vu auparavant. Un jeu habile. Il jouait, sans répondre à aucune question, sans prononcer un seul mot. Jusqu’à l’aube. Puis il s’endormit. Le matin, ma mère rigolait car il lui avait raconté qu’il avait épousé une femme qui valait beaucoup plus qu’elle. Moi aussi je riais de ces papillons qu’il gardait dans sa poche dans une boîte en plastique. D’où les avait-il ramenés ? Comment les avait-il chassés ? Comment les avait-il conservés dans cet état malgré la sécheresse de la mort ? D’autres questions surgissaient, en plus du nay, des semaines pendant lesquelles il avait disparu, de la barbe qui pour la première fois avait poussé comme si elle datait de plusieurs années et pas de quelques semaines. Sahaba, ou le cheikh Sahaba, comme on l’appelait désormais dans la rue, depuis cette barbe qu’il refusa de raser. Chasseur de papillons et joueur du nay. De quelle forêt et de quel paradis m’a-t-on offert tout cela ? Des questions … qui en amenaient d’autres. Sahaba le mystère. Sahaba l’indécision. Sahaba mon premier maître. La première leçon. 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Bien sûr, je ne lui prêtais guère attention. Son fauteuil faisait du bruit, comme n’importe quel bois vieux et décati. Maudite mémoire. Je ne me souviens plus comment est arrivé ce qui est arrivé. Les détails ne me viennent pas, me fuient, m’opposent leur rage et leur obstination. Peut-être se lovait-il un peu plus profond dans le fauteuil, peut-être son visage se crispait-il, en sueur. Peut-être retenait-il son souffle un peu plus fort. Peut-être empêchait-il l’oxygène d’arriver. Son visage s’assombrit, prit une teinte presque violette. Directement, il me précipita dans l’instant. Le sang de l’instant. J’étais pris de court. + +Etait-ce le visage du leader ? Ou cette feuille tremblotante ? + +Je le vis avancer vers la télé ; le leader maintenant épongeait la sueur de son front, au moment même de l’attaque. Deux mains imposantes ont attrapé l’appareil — avec à l’intérieur le leader — et l’ont jeté à terre. Cela a fait comme l’explosion d’une bombe : une lumière très forte et puis l’obscurité totale. Une étoile qui a brillé puis s’est abattue, une étoile qui de blanche est devenue noire, qui lumineuse s’est obscurcie. Le pauvre appareil était réduit en bris. Lui riait, insultait, maudissait. Le pyjama vert, les mains imposantes, le leader brûlé, l’appareil détruit, la peur infinie. Qu’était tout ce désordre ? De délicates créatures t’empêchent d’avancer. Hurlements de ma mère. Fumée étouffante. Hurlements de ma mère. Coups sur la porte. Hurlements de ma mère. Puis un rire hystérique de sa part à lui. Le bordel. Le bordel. Hurlements. Le bordel. Un regard qui zyeute le monde en biais ; ses yeux dilatés au maximum. Hurlements. Effarant regard en biais. Pupilles écarquillées à l’extrême. + +Installé sur ses débris, il rit. Les coups sur la porte, toujours. Aucun d’entre nous n’est capable d’approcher pour ouvrir. De l’extérieur, j’entends une voix s’inquiéter de mon père, de nous aussi. Est-ce que les gens ont eu peur du bruit de l’explosion ou de la fumée noire s’échappant des fenêtres de la maison ? Je hurlais de toutes mes forces à celui qui martelait la porte d’entrée : + +— Ce n’est rien, juste un peu de désordre. N’ayez pas peur. Juste un peu de désordre. Désordre, désordre, désordre. + +Un désordre insupportable pour le cœur. Plus que le cœur ne peut supporter, je vous le jure. Qui est cet homme ? + +C’est mon père. Toute cette énergie destructrice, c’est lui. + +Il s’est mis à marcher sur les entrailles et les débris de la télé. La scène se macula de rouge. Son sang. Ce que je voyais là était son sang. Lui, il hurlait : « Tu es un menteur, menteur, menteur, vous êtes tous des menteurs, des fils de chien, je vais tous vous juger, espèces de … ». + +Mon frère l’a attaché. Il est resté comme ça, attaché, pendant trois jours. C’était jusqu’à présent la période d’enfermement la plus longue qu’il avait passée à la maison. + +Avant, on l’attachait une heure, ou parfois plusieurs, ou pendant la nuit. Cette fois-ci il était resté attaché pendant plus de cinquante heures. Il délirait. Il ne mangeait pas, et n’a presque pas dormi pendant toutes ces heures. Cela a été pour lui la plus longue période sans sommeil : trois jours et trois nuits. Après ça, mon père a caché toutes les cordes qu’il y avait à la maison. Il a sectionné les cordes à linge, caché les clés de toutes les chambres. On ne les a jamais retrouvées. Je rigolais, la nuit, quand je me rappelais lui, qui nous hurlait au visage : tas d’abrutis, je vous protège et ça ne vous plaît pas ! + +Je me rappelais l’enfant qui tapait à la porte — le fils des voisins — et me remis à rire. Pendant que je lui parlais, j’avais le regard fixé sur ses mains et il les avait cachées derrière son dos : + +— Qu’est-ce que tu veux mon chéri ? + +— Je veux regarder. + +— Tu as raison, mon fils. C’est effectivement un spectacle. + +(4) + +Je ne sais pas comment c’est arrivé. On s’est rendu compte qu’il avait disparu. Des heures, qui se transformèrent en jours, puis en semaines. + +Sahaba avait disparu. + +Pas trace de lui sur les listes des urgences dans les hôpitaux ou les postes de police, ni chez les proches, les connaissances, les amis, ni même au village, à Mansoura, où se trouvaient la maison de son père et sa terre qui … + +Je ne sais rien de tout cela si ce n’est le résultat. Le retour de Sahaba. La lune avait cessé d’être pleine. Et l’hiver était au plus profond. + +Au moment où on s’est fatigués de chercher, Sahaba est revenu. A l’aube d’une nuit d’hiver au froid mordant. En sous-vêtements. Il grelottait. + +Déjà, de plus en plus, il nous échappait, perdu loin de nous. Il jouait sur un nay (une flûte), que personne d’entre nous n’avait vu auparavant. Un jeu habile. Il jouait, sans répondre à aucune question, sans prononcer un seul mot. Jusqu’à l’aube. Puis il s’endormit. + +Le matin, ma mère rigolait car il lui avait raconté qu’il avait épousé une femme qui valait beaucoup plus qu’elle. Moi aussi je riais de ces papillons qu’il gardait dans sa poche dans une boîte en plastique. D’où les avait-il ramenés ? Comment les avait-il chassés ? Comment les avait-il conservés dans cet état malgré la sécheresse de la mort ? + +D’autres questions surgissaient, en plus du nay, des semaines pendant lesquelles il avait disparu, de la barbe qui pour la première fois avait poussé comme si elle datait de plusieurs années et pas de quelques semaines. + +Sahaba, ou le cheikh Sahaba, comme on l’appelait désormais dans la rue, depuis cette barbe qu’il refusa de raser. Chasseur de papillons et joueur du nay. De quelle forêt et de quel paradis m’a-t-on offert tout cela ? + +Des questions … qui en amenaient d’autres. +Sahaba le mystère. Sahaba l’indécision. Sahaba mon premier maître. La première leçon. Sahaba est le premier à m’avoir appris que si les réponses, parfois, meurent, les questions, elles, ne meurent jamais . '
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Je rigolais, la nuit, quand je me rappelais lui, qui nous hurlait au visage : tas d’abrutis, je vous protège et ça ne vous plaît pas !', 26 => false, 27 => 'Je me rappelais l’enfant qui tapait à la porte — le fils des voisins — et me remis à rire. Pendant que je lui parlais, j’avais le regard fixé sur ses mains et il les avait cachées derrière son dos :', 28 => false, 29 => '— Qu’est-ce que tu veux mon chéri ?', 30 => false, 31 => '— Je veux regarder.', 32 => false, 33 => '— Tu as raison, mon fils. C’est effectivement un spectacle.', 34 => false, 35 => '(4)', 36 => false, 37 => 'Je ne sais pas comment c’est arrivé. On s’est rendu compte qu’il avait disparu. 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Puis il s’endormit.', 48 => false, 49 => 'Le matin, ma mère rigolait car il lui avait raconté qu’il avait épousé une femme qui valait beaucoup plus qu’elle. Moi aussi je riais de ces papillons qu’il gardait dans sa poche dans une boîte en plastique. D’où les avait-il ramenés ? Comment les avait-il chassés ? Comment les avait-il conservés dans cet état malgré la sécheresse de la mort ?', 50 => false, 51 => 'D’autres questions surgissaient, en plus du nay, des semaines pendant lesquelles il avait disparu, de la barbe qui pour la première fois avait poussé comme si elle datait de plusieurs années et pas de quelques semaines.', 52 => false, 53 => 'Sahaba, ou le cheikh Sahaba, comme on l’appelait désormais dans la rue, depuis cette barbe qu’il refusa de raser. Chasseur de papillons et joueur du nay. De quelle forêt et de quel paradis m’a-t-on offert tout cela ?', 54 => false, 55 => 'Des questions … qui en amenaient d’autres.', 56 => 'Sahaba le mystère. Sahaba l’indécision. Sahaba mon premier maître. La première leçon. Sahaba est le premier à m’avoir appris que si les réponses, parfois, meurent, les questions, elles, ne meurent jamais .' ]
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